Mercredi 17 - Mardi 23 avril. 1- Saint-Nazaire-Musée régional de l'air (Angers - Marcé ): 200 kilomètres à parcourir en 6 jours !


 Partir, et quitter la ferme, pour une longue route…
Avec le souvenir de Gudule et Laurent, et ces rires dans la nuit, et ces pas accomplis dans l’hiver de la Roumanie, et ces paroles échangées, autour d’une table, dans la clarté d’une famille, d’enfants nés en Europe et qui, la veille, ont parlé l’espéranto…
Ne pas me dire que mon voyage est un grand voyage…
Six mois ?
Contre six ans !

Partir, avec cette carte que nous avons allongée sur un roc…
Et ce chemin, qui s’est dessiné devant nous… 

La journée fut chaotique (les suspensions ayant lâché dès le départ, la roulotte ressemble à un manège dans une fête foraine, ambiance western !). Nous marchons sur une route encombrée par des bolides furieux... le seul volatile auquel je pense est le canard : il fait un froid de canard ! Le vent, le vent s'infiltre partout... 

Heureusement, nous sommes accueillis dans une ferme, l'électricité arrive mais la nuit est tombée et avec elle, les forces diminuent...

Départ de la ferme pour Le Boulay : nombre de km estimés : 35, nombre parcourus : 50 !
Une journée sans fin...
La marche continue des sabots... et que seules des vaches interrompent ou des gendarmes... alors que les visages expriment cette fatigue des grands jours de marche... 



Marcher... comme s'il ne fallait que marcher... 
ne pas s'arrêter, savoir que chaque pause nous retarde... 
et sentir la fatigue glisser sur nos joues fraîches...


 Se vider, se dénuder et une fois et nu s’emplir de saveurs
Et de savoirs nouveaux.
Se sentir proche des Lointains
Et consanguins des Différents.
Se sentir chez soi dans
La coquille des autres.
Comme un bernard-l’hermite.
Mais un bernard-l’hermite
Planétaire.
Jacques Lacarrière

Deux gendarmes, arrêtés sur le bas-côté, sortent de leur voiture, marchent vers nous, les bras en avant...
- Vous n'auriez pas vu des chevaux ? me demandent-ils.
- Des chevaux ? Ils se seraient échappés ?
- Je ne sais pas, nous avons été appelés au poste et il nous a été signalé qu'il y avait des chevaux sur la route.
- Des chevaux sur la route ? Eh bien... c'est nous !!! 
Et commence une conversation des plus heureuses, inattendues et... improbables.
Nos chemins se séparent parce que nous savons que devant nous, la marche sera longue...
Le soleil commence sa descente... 
Il n'est rien de plus décourageant que de croire qu'il vous reste 3 km à parcourir et que vos pas, lourds, ne vous mènent nulle part... comme si nous étions devenus fous, des automates idiots, poussés en avant vers les ténèbres de la nuit... alors tu marches, et tu marches et  tu vois ces chevaux continuer de marcher parce que telle est notre volonté...
Je croyais apercevoir le gite et le gite, tel un mirage, disparaît pour faire se découvrir des horizons de colza duquel jaillissent deux chevaux au galop... 
deux trait-d'union... 

Et puis arriver sur place, dans cette ferme pédagogique que nous a conseillé Laurent, fermier chez qui j'ai fait étape hier soir...
Ouvrir à nouveaux les yeux et se dire que le paradis sur Terre existe bien.

23h00. Ouvrir les cartes, demander : connais-tu quelqu'un qui pourrait nous accueillir ?
Le bouche à l'oreille...
Le nomadisme des voix, 
la constellation du ciel qui verse sur nous quelques poussières d'étoiles... 


Et, une fois les piquets plantés, se dire bonsoir, à demain...
S'approcher à pas lents du feu... 
Tout oublier pour retenir l'essentiel... 



Se vider, se dénuder et une fois et nu s’emplir de saveurs
Et de savoirs nouveaux.
Se sentir proche des Lointains
Et consanguins des Différents.
Se sentir chez soi dans
La coquille des autres.
Comme un bernard-l’hermite.
Mais un bernard-l’hermite
Planétaire.
Jacques Lacarrière



Et chuchoter... 
 Au petit matin... 
Se mettre à table devant le brama perdrix... et surtout, ne pas commander un oeuf à la coque. 
Mais entendre les braises craquer, sentir l'odeur du pain... qui vous caresse le palais...
et s'en aller, dans brumes matinales... chercher quelques plumes d'émeu... que j'offrirai ensuite à un enfant qui tendra sa petite lettre vers moi, et, secrètement, me confiera son rêve... 







 Je fais le tour de la propriété, longe la rivière, ramasse sur l'herbe couverte de rosée, des plumes par dizaines. 
 Tiens, mais qui voilà !?!?! 

 Et marcher avec l'émeu. quelle démarche ! 
Quel snobisme !



 En fin de matinée nous quittons la ferme, lieu d'accueil pour classes vertes...

La joie ! 










Que souhaitez-vous boire, demande Thomas en posant sur la table quelques bouteilles !!
Tiens donc ! 
Que vois-je ?